De grands airs contre la mort
A Atlantis, contrée de légende, l’empereur décrète la guerre générale entre tous ses sujets. Dépassée, la Mort décide alors de briser son épée : puisqu’elle n’est plus respectée, les hommes ne pourront plus mourir. Mais cette vie éternelle ne provoque que souffrance et chaos. Les hommes supplient la Mort de les délivrer...
Cet opéra de Viktor Ullmann a été composé derrière les barbelés du camp de Terezin. Ce compositeur tchèque, élève d'Arnold Schoenberg, avait été déporté par les nazis. Dans ce camp, ils avaient rassemblé beaucoup d’artistes, permettant paradoxalement la création d'une vie musicale de très haute qualité. Supposée se dérouler dans une contrée légendaire, la fable imaginée par le librettiste Petr Kien, un autre déporté, ne cesse de faire des allusions au régime hitlérien sous l'apparence d'un conte.
Entre opéra à numéros et cabaret, L’Empereur d’Atlantis va à l’essentiel. La musique, poignante, oscille entre Mahler et Weill. Elle emprunte aussi à la polyphonie et au jazz. L’œuvre fut longuement répétée à Terezin, avant d'être interdite de création. Viktor Ullmann et Petr Kien moururent dans une chambre à gaz d'Auschwitz le 18 octobre 1944.
Richard Brunel, habitué de la scène croix-roussienne et aujourd’hui directeur du Centre dramatique national de Valence, met en scène ce très bel opéra avec la complicité de l’Opéra de Lyon. Ecouter L’Empereur d'Atlantis, c’est bien sûr découvrir une très belle œuvre mais c’est aussi rendre hommage à des hommes qui résistèrent par leur art au cœur de l’horreur.