Bérangère Jannelle.
Avec Cyril Anrep, David Clavel, Raphaële Bouchard, De Corneille. Mise en scène : Mathieu Genet, Katia Lewkowicz.
O rage ! o désespoir, o vieillesse ennemie... », « Nous partîmes cinq cents... », « Rodrigue, as tu du cœur ? », l'atout ou le principal défaut du Cid est d'être « un tube » : qui n'a pas l'impression de connaître la chanson ? Bérangère Jannelle a décidé, elle, de changer le tempo. De ce drame d'amour et d'État, elle fait une corrida : décor rouge, Chimène séductrice en talons aiguilles, quelques pas de flamenco, deux ou trois notes de saxo, une envolée de confettis, toutes les couleurs de la movida. Sa version a du chien. Mais dans ce désir impérieux d'insuffler de l'air dans le classique, rien de gratuit. Avec la vitalité de son jeune âge et de celui de ses comédiens, elle veut faire parler l'héritage, montrer les carcans et les conventions, faire entrer le plaisir et la liberté, ne pas faire semblant. Corneille et ses vers y trouvent leur compte. Elle a travaillé avec précision sur deux versions duCid. La première intitulée « tragicomédie» avait fait scandale en 1637. La seconde, celle qu'on connaît, aux vers tellement plus policés, fut écrite 20 ans après ; Corneille la rebaptisa « tragédie ». C'est en puisant au coeur de cette mutation que la jeune metteuse en scène s'est affranchie. Et son Cid devient un manifeste pour l'affirmation du désir et la subversion. La révolution de Jannelle au pays de Corneille claque de toute la liberté de ses talons.