Envie confuse de créer un film muet au théâtre, utilisant seulement les moyens du théâtre, parce qu'à l'intérieur de leur différence apparaissait une profonde analogie entre les deux arts.
S'inspirant de vieilles pellicules, et de manuels de diction cinématographique des années vingt, le travail devait s'organiser autour d'une structure narrative très simple qui laissait une liberté absolue au jeu des acteurs. Un de ces manuels, suggérait aux aspirants-acteurs de travailler des sujets devant un miroir, de manière à exercer au mieux leurs propres qualités expressives. Des histoires variées et disparates ont été proposées aux acteurs, et l'accent a été mis sur la valorisation du caractère de chaque personnage, et le mélange de l'ensemble de ces caractères. De sorte que leur rencontre et leur confrontation pouvaient provoquer de fertiles développements dramaturgiques. Très vite, quelque chose du souvenir du cinéma des débuts s'installa autour des acteurs. Puis vint quelque chose de plus. Nous comprenions jour après jour que s'affirmait notre goût pour un récit évoquant l'atmosphère, les contours et les couleurs du cinéma muet.
Mais il a été particulièrement intéressant de découvrir que se sont les acteurs qui ont conquis les personnages, puis les personnages qui ont conquis l'histoire, pour l'amener vers un final empreint de cette identification collective aux saveurs pirandelliennes. Dans le pays de Pirandello, au moment où le cinéma et le théâtre se rendaient réciproquement hommage, c'était comme si le théâtre prenait tout à coup l'initiative de nous dévoiler, à travers ces mécanismes narratifs, comment, un siècle auparavant, un nouvel art avait pris vie à travers lui, en devenant bien vite adulte et en affirmant son autonomie.