Texte d'introduction de Jean-Pierre Plundr
Avancer que la lumière est le sujet principal de l'œuvre de Jean Rustin semble à priori un paradoxe, car ce que cet artiste nous invite inlassablement à regarder, ce sont des représentations de corps nus exprimant la résignation devant les fatalités de la vie et de la mort. Une fois dépassé ce qui nous est proposé dans la frontalité des tableaux et des dessins, l'idée, que c'est la lumière qui fait vibrer ces corps silencieux dans l'espace, paraît moins absurde. Tous ces personnages, prostrés, étonnés, effrayés, paraissent surpris et aveuglés, pris en flagrant délit d'existence, comme si, d'un au-delà céleste, une illumination venait de les tétaniser en projetant dans un décor réduit au minimum, l'ombre de leur désarroi et de leur souffrance. Et si, ces scènes répétées nous envoûtent, c'est que la représentation de cette lumière meurtrière dépasse le niveau de l'anecdote et de l'illusion pour conquérir celui de la vraie peinture.
Notes biographiques
Né le 3 mars 1928 à Montigny-lès-Metz, en Moselle. Il est le cadet d'une famille de cinq enfants.
En 1939, sa famille se réfugie dans le Berry puis à Poitiers où il commence ses études secondaires,
apprend le violon et entre à l’Ecole des Beaux-Arts.
En 1944, il regagne Metz, passe son bac et peint ses premières toiles.
Il vient à Paris en -1947 à l'âge de 19 ans et s'inscrit aux Beaux-Arts, dans l'atelier d'Untsteller.
Ses débuts furent sans doute influencés par le mouvement non-figuratif. Il passe
ensuite à une peinture abstraite plus lyrique et très colorée.
Une importante rétrospective d'une centaine de toiles au Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris en 1971 marque profondément la carrière de l'artiste. Il sera en effet bouleversé par la vision de l'ensemble de ses oeuvres qu'il jugera dès lors «trop belles».
Cette date marque un tournant dans son travail. Il mène seul, dans son atelier à Bagnolet, un travail de recherche approfondi.
Il réussit ainsi une vraie rupture. Son oeuvre peu à peu tend vers la figuration. Cette nouvelle direction révèle la certitude pour l'artiste d'inventer une peinture tout à fait personnelle.
Depuis les années quatre-vingt, son travail n'a plus été remis en cause par le peintre.
Une autre rétrospective organisée par Evelyne Artaud eut lieu à Créteil en 1982. Elle fût très controversée et en partie censurée pour motif de pornographie.
Depuis son oeuvre fût exposée dans de très nombreux musées ou lieux publics en France et à l'étranger, comme notamment à la Halle Saint Pierre, Paris en 2001, à l'Hôtel de Ville de Paris - dans le cadre d'une importante exposition sur le thème de la commune - en 2004 ou encore au Musée Frissiras d'Athènes qui consacra la même année une importante rétrospective à l'artiste.