Par Paul Clavier, philosophe à l’ENS Paris et Aurélien Barrau, astrophysicien à l’Université de Grenoble.
L'histoire de l'Univers et la nature de ses principaux constituants sont aujourd'hui connus avec une grande précision. Les piliers théoriques, relativité générale et mécanique quantique, qui sous-tendent notre cosmologie, sont bien établis et dessinent un ensemble cohérent pour la science d'aujourd’hui. Toutefois, différentes questions se posent encore quant à la nature de la matière et de l'énergie noire ou à la signification du Big Bang lui-même. Ces problèmes peuvent être aujourd'hui discutés non seulement sur un mode logique, mais aussi du point de vue de la dimension esthétique.
La notion d'esthétique a au moins deux niveaux de pertinence en cosmologie : d'une part l'expérience esthétique du "ciel étoilé" ou encore l'impression "sublime" de l'architecture des galaxies, des nébuleuses… d’autre part la "beauté" intrinsèque des théories. Celles-ci ont effectivement la "magnifique" capacité de synthétiser une somme "astronomique" (c'est le cas de le dire) de phénomènes au moyen de quelques espèces d'entités élémentaires et de quelques lois fondamentales - mais pas seulement : tout en étant d'une relative simplicité, ces théories offrent la possibilité de ramener variété et dispersion à un certain ordre. L'ambition (téméraire) d'une Théorie de la Grande Unification (entre l’infiniment grand et infiniment petit) n'est-elle qu'un fantasme esthétique, ou avons-nous des raisons de supposer que cette union doit être consommée ?
Paul Clavier
Agréré et docteur en philosophie, Paul Clavier est maître de conférences et directeur des études littéraires à l'ENS Paris.
Aurélien Barrau
Physicien et philosophe, maître de conférence à l’Université Joseph Fourier et au Laboratoire de Physique Subatomique et de Cosmologie de Grenoble (CNRS). Ses recherches portent sur la relativité générale, les trous noirs et la cosmologie.