Salle : Célestine
De : René Zahnd | Mise en scène : Jean-Yves Ruf
Avec Habib Dembélé, Hassane Kassi Kouyaté
Bab et Sane sont les derniers gardiens de la Villa Paradis, luxueuse propriété européenne d’un dictateur africain mégalomane et sanguinaire qui vient juste d’être renversé. Inquiets, suspendus dans la peur de l’inconnu, entre craintes et nostalgie des jours tranquilles, Bab et Sane questionnent le futur et le passé. Les nouvelles de leur patrie sont si floues, si lointaines. Que vont-ils devenir ? Vont-ils payer pour avoir été du mauvais côté ? Vont-ils rentrer ? Entre hypothèses et perspectives, leurs discussions parcourent cette étrange et terrible intimité d’un dictateur.
L’écriture de René Zahnd, sobre et précise, décrit sans effet les expériences et les sentiments mitigés des deux personnages, interprétés par Habib Dembélé et Hassane Kassi Kouyaté, deux personnalités étonnantes, acteurs africains, complices de Peter Brook et héritiers d’une longue lignée de conteurs traditionnels. Jean-Yves Ruf les a rencontrés grâce à René Zahnd au Théâtre Vidy-Lausanne. Leur complicité fut immédiate et donna naissance à ce projet inspiré d’un fait réel.
Dans la propriété suisse de Mobutu, après sa chute, deux gardiens zaïrois vécurent cette longue et indécise attente. René Zahnd s’empare de l’argument, se détachant de son contexte original, pour donner à la situation une dimension poétique et philosophique, dans la simplicité d’un huis clos sans artifice et souvent drôle. Devant le temps qui s’étire, les langues se délient et les relations s’animent. À tour de rôle, les deux hommes singent le despote déchu, jusqu’à s’identifier complètement à lui, dans un temps détraqué et sans repère. En mêlant humour mordant et réflexion sur le pouvoir, la pièce offre un double tranchant grâce à deux interprètes habiles et rayonnants.